STYLE
Dans son ouvrage Tenir tête aux géants du Web. Une exigence démocratique, Saulnier adopte un ton critique et militant, n’hésitant pas à dénoncer les dérives des géants du numérique et les risques qu’ils font peser sur la démocratie. Son propos est solidement documenté, s’appuyant sur des faits, des études et des exemples concrets pour étayer son analyse. Malgré la complexité du sujet, l’auteur réussit à rendre son livre accessible grâce à une écriture claire et pédagogique. Il évite le jargon technique et privilégie une approche explicative, ce qui permet au grand public de bien comprendre les enjeux. Son style journalistique, hérité de sa carrière dans les médias, donne au texte un rythme dynamique et percutant. Enfin, l’ouvrage a une dimension engagée : il ne se contente pas de constater les problèmes, mais propose des pistes de réflexion et des solutions pour contrer l’influence excessive des grandes plateformes.
RÉSUMÉ
Saulnier explore les dangers posés par les grandes plateformes numériques comme Google, Facebook, Amazon, l’intelligence artificielle, Apple et Microsoft. Il dénonce la manière dont des figures comme Donald Trump et Elon Musk ont utilisé les plateformes numériques pour propager la désinformation et la mésinformation. Il analyse comment Trump a exploité les réseaux sociaux, notamment Twitter (avant son rachat par Musk), pour diffuser de fausses informations, contourner les médias traditionnels et mobiliser ses partisans, ce qui a culminé avec l’assaut du Capitole en janvier 2021. Saulnier met en garde contre les dangers de cette instrumentalisation du numérique à des fins politiques, qui fragilise les démocraties et alimente les clivages sociaux. Il critique également Elon Musk, notamment après son acquisition de Twitter (rebaptisé X). Selon Saulnier, Musk a favorisé un climat de confusion en modifiant les règles de modération, en rétablissant des comptes suspendus et en encourageant une vision absolutiste de la liberté d’expression, parfois au détriment de la lutte contre la désinformation et les discours haineux. Saulnier met en lumière leur influence sur la démocratie, notamment en matière de concentration du pouvoir, de manipulation de l’information et d’exploitation des données personnelles.
Il aborde le rôle du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) dans l’ère du numérique, en pleine transformation face aux défis posés par les géants du Web. Il souligne que le CRTC, historiquement chargé de réguler la radiodiffusion et les télécommunications au Canada, doit aujourd’hui s’adapter face à la domination des plateformes comme YouTube, Netflix et Facebook lesquelles échappent souvent aux régulations traditionnelles. Avec l’adoption de nouvelles lois comme la Loi sur la diffusion continue en ligne (projet de loi C-11), le gouvernement canadien tente de redéfinir le rôle du CRTC pour inclure ces nouveaux acteurs dans un cadre réglementaire.
L’auteur met en lumière les enjeux qui sous-tendent le conflit entre Poilievre et Radio-Canada : la bataille entre médias traditionnels et plateformes numériques, et la question de qui contrôle l’information dans un monde dominé par les géants du Web. En qualifiant Radio-Canada de média biaisé et en refusant d’interagir avec certains journalistes, Poilièvre alimente une méfiance envers les médias établis, une tendance que Saulnier considère comme dangereuse pour la démocratie.
Saulnier alerte sur les dangers que les grandes plateformes numériques font peser sur la démocratie. Il met en évidence le rôle des plateformes numériques dans la diffusion massive de fausses informations, souvent amplifiées par des algorithmes favorisant le sensationnalisme et les contenus polarisants. Il cite l’exemple de Trump et Musk, qui ont utilisé ces outils pour influencer l’opinion publique sans passer par des médias encadrés par des normes journalistiques. Il dénonce le modèle économique imposé par les géants du Web, qui siphonne les revenus publicitaires des médias traditionnels, mettant en péril le journalisme indépendant. Il met en évidence comment certains leaders politiques, comme Pierre Poilievre au Canada, choisissent de communiquer directement via les réseaux sociaux en évitant les médias traditionnels. Cette stratégie leur permet de contrôler leur message sans être confrontés à des questions critiques, affaiblissant ainsi la transparence et la reddition de comptes. Il dénonce le manque de régulation des plateformes numériques et plaide en faveur d’un meilleur encadrement par les gouvernements, tout en soulignant le fait que des pays comme le Canada tentent de réagir avec des lois comme le projet C-18 sur la rémunération des médias par les plateformes afin d’éviter qu’elles n’agissent en toute impunité.
IMPRESSIONS
Tenir tête aux géants du Web expose comment l’emprise du numérique, si elle n’est pas contrôlée, risque de fragiliser les fondements mêmes de la démocratie. « Voulons-nous vraiment que les personnes les plus riches de la planète, comme Elon Musk, Mark Zuckerberg, Jeff Bezos et quelques autres, dictent nos vies, nos valeurs, nos cultures, nos choix de société et notre avenir ? Ça me semble tellement inacceptable. Pour paraphraser un certain capitaine Haddock : “Branle-bas de combat, tout le monde sur le pont !” »
Il plaide pour une reprise en main collective, en encourageant une régulation plus stricte, le développement d’alternatives locales et une prise de conscience citoyenne. Il invite les gouvernements, les médias et les citoyens à s’affranchir progressivement de ces monopoles en soutenant des plateformes ouvertes, éthiques et transparentes.