CONTEXTE
Dans Everglades, R.J. Ellory nous plonge au cœur d’un pénitencier de haute sécurité, dans l’Amérique des années 1970, là où la justice prend les traits les plus sombres de l’humanité : le couloir de la mort. Fidèle à ses thèmes, Ellory explore les marges de la conscience morale et les zones grises de l’âme humaine. Il y met en scène des antihéros, ces personnages ordinaires précipités dans des dilemmes où devoir et compassion, vérité et survie s’opposent cruellement. Dans Everglades, c’est à travers l’univers carcéral qu’il interroge ces tensions : un système qu’il décrit comme une machine usée, rouillée par l’habitude, et qui survit faute d’avoir su redéfinir ce qu’est véritablement la responsabilité humaine. À la croisée du thriller psychologique et du drame existentiel, Everglades est un roman de tension, de détails immersifs, d’exploration intérieure et de longues pauses réflexives.
RÉSUMÉ
Dans une prison isolée au cœur des marécages de Floride, dans les années 1970, des hommes vivent à l’ombre de la mort. Gardiens et condamnés se côtoient dans l’attente silencieuse de l’inéluctable : l’exécution. Le récit suit principalement Nelson, surveillant du couloir de la mort, un homme ordinaire, ni cynique ni héros, qui tente de rester droit au sein d’un système qu’il sent profondément malade. Chaque exécution laisse une marque. Et celle de Whitmann, condamné à mort, pourrait être celle de trop.
Whitmann, figure énigmatique, n’est ni tout à fait coupable ni tout à fait innocent. Sa présence force Nelson à reconsidérer la mécanique froide de la justice, les procédures qu’il applique sans plus les comprendre. Face à ce détenu silencieux, Nelson sent ses convictions vaciller. À travers ses yeux, nous découvrons les rouages d’une justice américaine brutale, hantée par la question de la peine capitale.
Au cœur de cet univers clos et oppressant, Hannah – d’abord infirmière de Nelson après qu’il a été blessé lors d’une opération d’envergure dans son ancien poste de shérif, devenue depuis sa compagne – incarne un contrepoint lumineux. Femme juste, solide, imperméable à la peur comme au cynisme ambiant, elle représente une forme d’intégrité que Nelson admire profondément. Sa présence l’ancre, l’aide à rester debout alors que le doute s’infiltre en lui, rongeant peu à peu ses certitudes.
IMPRESSIONS
Le choix d’une narration à la troisième personne omnisciente permet à l’auteur de pénétrer alternativement les pensées et les états d’âme de plusieurs personnages - notamment Nelson, le gardien de prison hanté par ses choix, et Hannah, figure morale et affective du récit - tout en conservant une certaine distance. Cette voix narrative permet aussi à Ellory de déployer des réflexions d’ordre éthique ou existentiel sur la peine de mort et la justice.
Cependant, cette omniscience installe parfois une distance un peu froide, presque clinique, notamment dans la description du milieu carcéral. Cette posture narrative, si elle vise la précision, tend à affaiblir l’immersion émotionnelle du lecteur dans certaines scènes.
Un dénouement troublant et bouleversant